Nymphoplastie de réduction

Professeur Hersant - Chirurgie de la femme à Paris Est Créteil

Introduction

La nymphoplastie de réduction est aujourd’hui la procédure de chirurgie plastique génitale la plus réalisée dans le monde. Elle consiste à réduire la taille des petites lèvres féminines par une exérèse de l’excès muqueux. L’hypertrophie des petites lèvres est définie par une taille excessive des petites lèvres par rapport à celle des grandes lèvres. La demande concernant cette chirurgie est croissante d’année en année et il est important pour chaque chirurgien pratiquant ce type de procédure de connaitre parfaitement la zone anatomique et les implications chirurgicales.

Il existe un grand nombre de techniques décrites concernant la nymphoplastie de réduction. Néanmoins, deux techniques principales sont aujourd’hui réalisées : la technique dite « wedge reduction » et la technique de résection longitudinale(1). Les avantages et les inconvénients de chaque technique sont à prendre en compte avant de les proposer à ses patientes.

L’hypertrophie des petites lèvres est définie comme une augmentation de la taille des petites lèvres. Cependant, il existe une variation interindividuelle importante et il est difficile de proposer une norme dans ce domaine. La perception de l’apparence « normale » des petites lèvres est particulièrement influencée par des considérations culturelles et notamment d’exposition à la pornographie(2), bien que cette théorie ait été récemment discutée(3).

Anatomie et physiologie

Embryologiquement, les grandes lèvres chez la femme sont dérivées des bourrelets génitaux qui vont donner le scrotum chez le fœtus masculin. En revanche, les petites lèvres se développent à partir des plis génitaux, qui, chez le fœtus mâle, fusionnent pour former le raphé médian.

Les petites lèvres sont des replis cutanéo-muqueux dépourvus de poils et contenant en leur sein, des glandes sébacées. Elles se prolongent par deux extensions au niveau supérieur pour former le frenulum situé sous le clitoris et le capuchon clitoridien qui recouvre le clitoris(4).

La taille moyenne des petites lèvres est de 2 cm mais ce chiffre peut varier de 7 mm à 5 cm.

Les petites lèvres ont deux rôles principaux qui sont primordiaux chez la femme et qu’il convient de préserver lors de toute chirurgie. Elles préviennent la sécheresse vaginale et aident à guider le flux urinaire une fois extériorisé de l’urètre. Lors de la chirurgie de nymphoplastie, il est important de laisser en place une petite lèvre de plus de 1 centimètre et de ne pas dépasser la ligne de Hart (ligne de démarcation entre la petite lèvre et le vestibule) lors de la résection cutanéo-muqueuse.

En effet, le vestibule vulvaire s’étend latéralement de l’anneau hyménal à une ligne de muqueuse davantage kératinisée au niveau des petites lèvres : c’est la ligne de Hart(5). Les glandes sébacées s’arrêtent généralement à mi-chemin le long de la surface de la petite lèvre, cette ligne correspond à la limite entre la muqueuse et l’épithélium squameux.

Figure 1 : Anatomie de la vascularisation artérielle des petites lèvres avec une prédominance de la vascularisation supérieure.

La vascularisation des petites lèvres est réalisée par un réseau vasculaire entre l’artère pudendale interne et l’artère pudendale externe. En effet, la face antérieure des petites lèvres est alimentée par des branches de l’artère pudendale externe alors que la face postérieure, quant à elle, est vascularisée par des branches de l’artère pudendale interne. Au niveau de la petite lèvre, la vascularisation est répartie sur sa surface par l’intermédiaire de trois branches artérielles transversales. L’artère pudendale interne donne également des branches pour le capuchon clitoridien.
Le retour veineux se fait via la veine pudendale interne ainsi que le plexus veineux vaginal.

Concernant l’innervation, la face antérieure des petites lèvres est innervée par des branches du nerf ilio-inguinal (T12-L1) et du nerf génito-fémoral (L1-L2). La face postérieure étant innervée par des branches du nerf pudendal interne (S2-S4).

Enfin, il est important de savoir que le clitoris se situe juste sous le capuchon clitoridien. Ce dernier est innervé par le nerf dorsal du clitoris qui possède deux branches qui cheminent à 11h et 1h au contact du corps du clitoris(6). Il est crucial de ne pas léser ces deux branches nerveuses pour ne pas entrainer de complications qui peuvent être dramatiques chez la femme (perte de sensibilité, névrome).

Classifications

Il existe deux principales classifications qui vont permettre de classer le degré d’hypertrophie des petites lèvres, ainsi que la localisation de l’hypertrophie : la classification de Motakef (Figure 2) et la classification de Banwell(7). Ces deux critères pourront avoir un impact sur le choix de la technique de résection.

Figure 2 : Classification de Motakef. Elle classe la longueur des petites lèvres en 3 catégories selon la longueur de ces dernières. Classe I : 0 à 2 cm, Classe II : 2.à 4 cm, Classe III : plus de 4cm.

Indications

Les principales indications de réduction des petites lèvres sont les suivantes :
   • Gène esthétique : petites lèvres présentant des replis, asymétriques, trop grandes
   • Gène physique : lors de la marche, du sport, du port des vêtements serrés
   • Gène sexuelle : douleurs au moment des rapports (dyspareunie superficielle) liées à la pénétration de la petite lèvre dans le vestibule vulvaire

Ces indications sont subjectives et il est important de se rappeler qu’il n’existe pas de petites lèvres « anormales » mais qu’il s’agit de variations autour de ce qu’on pourrait appeler la « norme ». Il est donc important de se baser sur le vécu rapporté par la patiente et de prendre en compte son histoire et son ressenti. Il est également important de ne pas poser d’indication excessive en proposant une nymphoplastie chez une patiente qui ne présente pas de réelle demande à ce sujet. Ces gênes sont à l’origine de troubles psychologiques et d’une diminution de la qualité de vie sexuelle(8).

Contre-indications

Les principales contre-indications à la nymphoplastie de réduction sont l’absence de longueur suffisante des petites lèvres. En effet, le risque est de laisser une petite lèvre de taille insuffisante, notamment en réséquant ce dernier au-delà de la ligne de Hart et donc d’altérer sa fonction.

Le tabagisme est également une contre-indication à la nymphoplastie, principalement lorsque l’on utilise la technique wedge car la résection se fait sur une zone de faible vascularisation.

Comme dans toute opération de chirurgie plastique, l’évaluation globale de la patiente doit être réaliser et il est nécessaire d’éliminer toute dysmorphophobie.

La société royale de gynéco-obstétrique de Grande-Bretagne a émis des réserves sur la pratique de la nymphoplastie chez les mineurs en raison de l’explosion du nombre d’interventions chez les moins de 15 ans. Comme toute intervention sur les organes sexuelles primaires ou secondaire, il est préférable d’attendre la fin de la puberté et de la croissance.

Préparation pré-opératoire

Lors de l’évaluation des patients pour une chirurgie labiale, il est essentiel de comprendre leurs objectifs et leurs attentes. L’interrogatoire doit notamment s’attarder sur l’historique sexuel et gynécologique. Il est important de décrire à la patiente les bases anatomiques.

L’examen des organes génitaux est crucial et on évaluera la taille des petites lèvres, leur asymétrie et leur pigmentation. Il peut être particulièrement utile de laisser à la patiente un miroir afin qu’elle puisse participer à la planification chirurgicale. Il est obligatoire de réaliser des photographies en position gynécologique et debout (avec le consentement de la patiente).

L’arrêt du tabac devra intervenir au minimum 1 mois avant l’intervention afin de limiter tout risque vasculaire. Aucun médicament contenant de l’aspirine ne devra être pris dans les 10 jours précédant l’intervention. Rappelons que les petites lèvres sont glabres et que la dépilation n’est donc pas nécessaire à ce niveau.

Anesthésie

En général, l’intervention est réalisée en chirurgie ambulatoire. L’anesthésie peut être choisie à la convenance de la patiente et du chirurgien. L’intervention peut se dérouler sous anesthésie locale pure, anesthésie locale associée à une sédation, rachianesthésie ou encore sous anesthésie générale pour plus de confort.

Technique chirurgicale : la technique « wedge »

Figure 3 : technique de résection de type « Wedge »

La technique wedge (Figure 3) convient davantage aux patientes présentant un allongement radial des petites lèvres et qui présentent une pigmentation continue des bords. En effet, le tissu réséqué correspond à la partie la plus protubérante des petites lèvres. La partie supérieure et inférieure de la petite lèvre étant remises en continuité, il est important que la coloration soit identique afin de ne pas créer de discontinuité chromique(9).

Les marquages sont réalisés avant l’infiltration. La branche supérieure de V doit être placée au niveau supérieur de l’excès cutanéo-muqueux et la branche inférieure au niveau du pôle inférieur de l’excès. La branche antérieure ne doit pas être placée trop proche du méat urétral (plus de 0,5 cm) afin de ne pas entrainer de rétractions à ce niveau. Les deux bords du V doivent pouvoir se rapprocher l’un de l’autre avec une tension minimale. Il est important de reporter le dessin sur chaque face des petites lèvres de manière symétrique.

L’incision initiale est cunéiforme au niveau du versant cutané en externe et muqueux en interne au centre de la petite lèvre. Il est ensuite réalisé une exérèse de l’excédent cutanéo-muqueux. On peut s’aider de deux pinces de Kocher placées en dessous de chaque branche du V afin de réaliser la résection à la lame froide le long de chaque mords de la pince. Par la suite, il est important de réaliser une bonne hémostase à la pince bipolaire afin d’éviter toute formation d’hématome post-opératoire. Certains préconisent une désepithélialisation de V pour laisser en continuité le plan profond de tissu conjonctif.

La fermeture est le point le clé de l’intervention car le risque de désunion est important.

Si on pratique une désépthélialisation du V, alors 2 surjets seront à réaliser ; si on pratique on résection cutanéo-muqueuse, on doit réaliser 3 surjets : un interne sur le plan conjonctif de monocryl ou vicryl 4/0 incolore ; un plan superficiel externe par du moncryl ou vicryl rapide 4/0 et un plan superficiel interne par du vicryl rapide 4/0.

Technique chirurgicale : la technique de résection longitudinale

Figure 4 : technique de résection de type « linéaire »

La technique de résection linéaire du bord libre des petites lèvres peut convenir pour une grande diversité de petites lèvres et notamment celles qui ont une pigmentation discontinue des bords à la différence de la technique wedge (Figure 4). Elle conviendra également mieux aux femmes qui ont un risque vasculaire local plus élevé.

Les marquages sont faits avec un marqueur chirurgical. La résection débutant latéralement et sous le frein et s’étendant jusqu’à l’orifice vaginal en inférieur. Il est important de réaliser le marquage sur les deux faces des petites lèvres afin de ne pas dévier dans sa résection par la suite. Un placement conservateur des marquages est recommandé, car il est préférable laisser plus de lèvres que d’en enlever en excès. Afin d’obtenir une forme finale la plus naturelle possible, le marquage doit être réalisé curvi-linéaire avec une convexité externe placée au niveau du 1/3 supérieur de la petite lèvre. La résection peut être plus importante au niveau de la face médiale tout en laissant une face latérale légèrement plus large afin de placer la cicatrice en interne afin qu’elle ne soit pas directement sur le bord libre (moins visible en interne). Il est extrêmement important de laisser au minimum 1cm de petite lèvre et de ne pas dépasser la ligne de Hart lors de la résection.

On place un crochet de Gillis à chaque extrémité du bord libre de la petite lèvre. L’incision est réalisée à la lame froide sur chaque versant de la petite lèvre selon les dessins pré-opératoires. La résection se fait ensuite à la pointe colorado ou à la radiofréquence. Une hémostase soigneuse à la pince bipolaire doit être réalisée. La fermeture est réalisée avec un surjet sous-muqueux de Monocryl 4/0 puis avec un surjet cutanéo-muqueux de Vicryl 4/0 incolore.

Soins post-opératoires

Les soins post opératoire consistent en un nettoyage à l’aide de sérum physiologique quotidien après chaque passage aux toilettes. Le port d’une culotte ample en coton est recommandée durant 1 mois. Les rapports sexuels doivent être interrompus durant 1 mois également.

Résultats

Le résultat peut être jugé 3 à 6 mois après l’intervention. Certaines patientes font des œdèmes importants pendant plusieurs mois, notamment celles qui présentent des varices vulvaires et celles qui ont eu des œdèmes importants après l’accouchement. Les cicatrices s’estompent en 3 mois et la vulve retrouve une forme harmonieuse en accord avec les souhaits de la patiente. Il existe fréquemment des asymétries résiduelles qui ne remettent pas en cause le résultat esthétique. Parfois, la résection peut être insuffisante et une correction chirurgicale secondaire peut intervenir avec un délai dé 6 mois à 1 an. Nous recommandons d’associer un lipofilling des grandes lèvres(10), en cas d’hypotrophie associée pour améliorer le résultat cosmétique.

Il a été démontré par certains auteurs que le fait d’associer un lipofilling des grandes lèvres permettait de diminuer la résection des petites lèvres(1).

L’analyse du capuchon clitoridien est importante; il est souvent hypertrophique, on peut observer des dédoublement. Dans ce cas, on peut corriger l’excès par une plastie en chevron du capuchon clitoridien tout en respectant 5 mm par rapport au bord libre du prépuce clitoridien. L’hémostase à la bipolaire est obligatoire pour éviter toute diffusion vers le clitoris afin de ne pas léser les deux branches du nerf dorsal du clitoris qui cheminent à 11h et 1h sur le corps du clitoris. Fermeture par des points séparés de vicryl rapide 4/0 incolore.

Plastie en chevron du capuchon clitoridien

Figure 4 : technique de résection de type « linéaire »

Le capuchon clitoridien varie anatomiquement d’une femme à l’autre. Il peut parfois posséder une part cutanée très importante et recouvrir totalement le clitoris. Certaines femmes se plaignent alors de difficultés à la stimulation clitoridienne à ce niveau. On peut alors proposer une plastie en chevron du capuchon clitoridien. Attention, cette technique est simple mais n’est pas anodine car les deux branches du nerf dorsale du clitoris cheminent à la partie supérieure du corps du clitoris (elles se ramifient et s’enfouissent au niveau du gland clitoridien). Il faut alors systématiquement respecter une distance de 5 mm par rapport au bord libre du prépuce clitoridien.

Le dessin de la plastie prend une forme de « chevron » ou de « chapeau de gendarme » (Figure 5). On réalisera par la suite une désépidermisation de la zone uniquement. La suture se fera à l’aide de points simples de Vicryl rapide 4/0. La résection permettra de remettre en tension le capuchon et de découvrir le gland du clitoris.

Complications

La principale complication de la nymphoplastie est la déhiscence de la cicatrice post-opératoire, notamment chez les patientes fumeuses. Il s’agit d’une complication nettement plus fréquente lorsque la technique wedge est employée du fait de la présence de la cicatrice dans la zone de faible vascularisation. Pour éviter au maximum cette complication, il est impératif que la patiente cesse toute consommation tabagique au minimum 1 mois avant et après l’intervention. Il est également important d’éviter toute tension au moment de la fermeture et de placer la cicatrice de nymphoplastie la plus en avant possible lorsque la technique wedge est choisie afin d’éviter toute section de la branche artérielle vascularisant la portion centrale de la petite lèvre.

Les hématomes peuvent survenir dans les 24 à 48 premières heures. Ils peuvent être révélés par un gonflement ou une douleur asymétrique.

L’infection n’est pas fréquente mais peut survenir. Il conviendra de la traiter par une antibiothérapie adaptée.

Une altération de la sensibilité est exceptionnelle mais peut survenir et il est important de prévenir les patientes de cette éventualité. Tout comme une hypersensibilité du bord libre dans les résections linéaires. Afin d’éviter cette complication, il est utile de placer la cicatrice sur le bord interne de la petite lèvre.
Dans de rares cas, on peut observer des dyspareunies souvent liées à des résections trop importantes ou dépassant la ligne de Hart.

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